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Mon Blog Anti-Sarko
16 décembre 2007

Le Karcher, le juge et le calife

Par claris (www.groupeclaris.com)

Encore sous le coup des débats sur la Constitution Européenne et des résultats du 29 mai qui auront marqué un nouveau désaveu cuisant des élites politiques et médiatiques, nous voici ramenés à nos tristes passions hexagonales. Coup sur coup, en effet, le ministre de l'Intérieur s'est rappelé au bon souvenir des Français pour afficher de façon plus péremptoire que jamais sa conception de la politique. Ce sont d'abord les propos sur le « nettoyage au Karcher » de la cité des 4000 à La Courneuve, qu'il a tenu suite à la mort de Sidi-Ahmed, 11 ans. C'est ensuite sa sortie à propos du « juge qui doit payer sa faute » pour avoir remis en liberté un des meurtriers présumés de Nelly Crémel, déjà condamné à perpétuité pour assassinat mais remis en liberté conditionnelle en 2003. C'est encore, plus discrètement, son intervention au siège de l'UOIF pour convaincre ses responsables de rester au bureau du Conseil du culte musulman, la présidence revenant de droit au recteur de la mosquée de Paris suite aux accords de décembre 2002. Ravis sans doute d'un tel retour dans l'arène, les médias en ont fait leurs gros titres, pour se féliciter de la fermeté ou s'inquiéter des dérives populistes du principal candidat aux prochaines élections présidentielles. On retrouve pourtant dans ces trois actes une association étrange entre une politique hypersécuritaire, un fantasme de toute-puissance discréditant l'institution judiciaire et une tentation communautariste.

Il y a pas de quoi s'en réjouir. Car ces sorties traduisent en creux l'échec d'une politique de sécurité. Bien des développements pourraient le démontrer mais tenons-nous en à la fusillade survenue à la cité des 4000. Selon les informations communiquées, elle résulterait d'un règlement de comptes entre deux équipes de trafiquants de drogues usant d'armes à feu pour maintenir leur emprise sur leur terrain. Depuis de nombreuses années, tous les acteurs et observateurs attentifs savent ce qu'il en est. Rien n'a changé, ni les coups de poing sur la table, ni la loi sur la sécurité intérieure, ni la mise en place des GIR (Groupement d'intervention régional réunissant des magistrats, des agents du fisc, des policiers et des gendarmes). Pourquoi ? Parce que les trafiquants sont des « mafieux de cité », qu'ils contrôlent le territoire et bénéficient de protections ? Mais la Seine-Saint-Denis n'est pas la Sicile ou la Corse ! Les moyens mis en œuvre seraient-ils, toujours et encore, insuffisants ? Ce n'est pas faux mais cette ritournelle corporatiste est-elle suffisante ? À qui veut-on faire croire que les problèmes liés au bizness pourraient, comme par magie, être « traités » par la mise en place d'un « groupe local de traitement de la délinquance » ? L'activisme communicationnel et la mise en scène du « père Fouettard » peuvent séduire les couches moyennes et populaires inquiètes et tous ceux qui sont tentés par la droite extrême. Mais ces tactiques politiciennes peuvent-elles avoir un effet sur les acteurs des trafics - organisés ou pas - qui fleurissent dans certains quartiers ? Le ministre de l'intérieur d'aujourd'hui peut renouer avec d'anciennes pratiques qui faisaient donner la troupe contre les « classes dangereuses ». Mais avec quels résultats ? Avant même l'intervention de police qui a eu lieu le..., tout le monde était au courant et les oiseaux se sont envolés...

En ce qui concerne la mise en cause du juge, c'est autre chose, ou plus grave encore. « Dans son délire de toute-puissance, analysait Dominique Barella, président de l'Union syndicale des magistrats, Nicolas Sarkozy devient à lui seul le gouvernement, le Parlement et le juge. » (Libération, 24 juin 2005). Inquiétante confusion des pouvoirs ! Elle participe, en outre, d'un effet de méconnaissance quant à la manière dont les décisions de libération conditionnelle sont prises, mais aussi du fait que les cas de récidive des criminels sont extrêmement rares. Doit-on rappeler que l'un des rares aspects positifs de la loi Perben 2 réside justement dans le renforcement de la collégialité des décisions d'application des peines. Ose-t-on indiquer que le parquet, sous le contrôle hiérarchique du ministre de la Justice, n'a pas fait appel de la décision de libération. Si des sanctions devaient s'imposer il serait logique que le Garde des sceaux les subisse ! Une enquête récente conduite par Pierre V. Tournier et Annie Kensay a comparé l'efficacité de la prison et celle des peines alternatives. Il en ressort que les condamnés sortant de prison ont plus de risque de retourner en prison dans les six ans suivant la fin de leur peine (près de 70 %) que ceux ayant effectué une peine alternative en milieu ouvert (20%). Il y a de quoi faire réfléchir les partisans du tout-carcéral qui devraient tempérer leur dogmatisme d'une bonne dose de pragmatisme dans l'intérêt du bien commun et du respect de la démocratie.

Les dernières élections du Conseil Français du culte musulman (CFCM) sont, dans cette cacophonie, passées plus inaperçues. Elles ont été marquées par une percée de la Fédération nationale des musulmans de France et le recul de l'UOIF. Pourtant le pouvoir de la Mosquée de Paris et le leadership de Dalil Boubeker n'ont été en rien remis en cause. Depuis les années 1980, l'islam de France est sous le contrôle de l'Algérie et la Mosquée de Paris assure la défense de ses intérêts. Qui y trouverait à redire ? Sans doute pas les deux principales forces se satisfaisant d'une alliance évitant de composer avec l'UOIF assimilé à l'islam des Frères Musulmans. En conséquence, l'islam de France reste dépendant et de ces tutelles extérieures et des pouvoirs publics « toujours tentés de lui fixer une feuille de route et de s'en servir comme un vecteur de contrôle social » [1]. Dans ce contexte, le souci de maintenir la présence de l'UOIF n'est pas neutre : il vise à établir en apparence un équilibre des forces tout en légitimant une organisation dont les valeurs et les logiques communautaristes paraissent pourtant bien éloignées de celles de la République défendues par ailleurs. Mais en ces temps de réhabilitation de l'histoire coloniale (voir la loi du 25 février 2005), le gouvernement n'en est pas à une contradiction près.

La nature a horreur du vide. C'est aussi vrai en politique. Cela donne une situation où il faut constater que Nicolas Sarkozy apparaît sinon comme le seul homme politique du pays, du moins comme celui qui occupe tout l'espace. Il balaye en effet le spectre de l'électorat depuis les ouvriers et les chômeurs précarisés jusqu'aux cadres et aux patrons de l'industrie et du commerce. Loin de prendre acte du rejet du libéralisme, il dénonce l'égalitarisme, le nivellement et l'assistanat. Jusqu'à quand ? Et comment s'y opposer ? C'est bien à ce défi que la gauche, aujourd'hui affaiblie et éclatée, devra répondre, si elle veut éviter que l'histoire se répète en sa défaveur, comme lors de ce triste 21 avril 2002. Le temps des projets est à venir et il n'est pas trop tard pour sortir de ce climat populiste et tenter de construire un avenir meilleur, valorisant les aspirations collectives de nos concitoyens plutôt que de surfer sur leurs peurs en les dressant les uns contre les autres.






REAGISSEZ, REAGISSEZ!!!

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  • Ce blog est fait pour tous ceux qui s'intéressent, de près ou de loin, à la politique, et à son principaux personnage, "chouchou" des média (télé, journaux...) mais aussi ancien Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire; j'ai nommé: Nicolas
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